Dombes, d’hommes et d’oiseaux La passion de la Dombes

24oct/10Off

Mouettes et goélands

Le Goéland leucophée

Le Goéland leucophée Larus michahellis est le pendant méditerranéen à pattes jaunes de l’indéfectible Goéland argenté Larus argentatus à pattes roses de vos vacances à Brest, Quiberon ou Saint-Malo. Loin des rivages mais jamais de l’eau, une population est partie à la conquête de l’intérieur, le long des cours du Rhône et du Rhin.

Goéland leucophée :...des pattes jaunes

Il est parvenu jusqu’en Dombes, où il s’accommode moins facilement de la vie coloniale des littoraux. Un îlot, un couple, telle est ici sa stratégie territoriale.

Le Goéland argenté (...des pattes roses) : occasionnel en Dombes

De ce fait, il a pu élire domicile sur les ilots de quelques étangs, presque toujours d’une superficie supérieure à une dizaine d’hectares : les petits étangs sont rarement pourvus d’ilots, et le cas échéant, la sécurité n’y est évidemment pas optimale…

Il est un prédateur opportuniste mais redoutable des jeunes grèbes, foulques, guifettes, et canetons. Ce qui explique que sa population n’ait localement jamais vraiment décollé : si certains gestionnaires voient en lui un remède efficace limitant la production des grèbes huppés, d’autres considèrent plutôt sa présence comme un problème à résoudre…

Population actuelle : une vingtaine de couples à la fin des années 1990, n’excède pas 13 couples en 2005, et est inférieure à 10 couples en 2009.  5 couples au plus en 2010.


La colonie de mouettes : matrice de l’étang

Autrefois si souvent commensale du paysan...

La Mouette rieuse Larus ridibundus, très ancienne commensale du pêcheur, suit les embarcations en compagnie des goélands, en mer et sur les lacs, se satisfaisant des déchets de la pêche. Elle a accompagné la charrue, successivement entrainée par les bœufs, puis par le tracteur, et qui découvre les lombrics [1] comme les campagnols.

Plusieurs études ont démontré l’attractivité qu’exerce une colonie sur d’autres espèces. Elle protège l’ensemble de la communauté, aussi turbulente soit-elle, de l’intrusion des prédateurs. La colonie appelle à une plus grande diversité des espèces, coloniales également dans le cas du Grèbe à cou noir Podiceps nigricollis et de la Guifette moustac Chlidonias hybridus, ou simplement sociables comme celui des fuligules [2].

I

Les naturalistes constatent la raréfaction des grandes colonies, dont les effectifs étaient supérieurs à un millier de couples. A l’inverse, ils constatent un éclatement de la population en de petites colonies moins productives. De ce fait, les dombistes sont persuadés, à tort, de l’augmentation des mouettes. La confusion pourrait être augmentée par les rassemblements hivernaux sur les vidanges hivernales qui précèdent les pêches, et bien que cette population hivernante ne semble pas augmenter. La Mouette traîne le lourd chalut d’une réputation de piscivore, ce qu’elle est en partie, et notamment à cette période de l’année. D’un impact mineur sur la production de poisson, elle hérite essentiellement du ressentiment d’une profession excédée envers des espèces nettement plus déprédatrices.

Ces confusions entre populations nicheuses et hivernantes sont classiques.

Le baguage des oiseaux : une aide à la compréhension de leurs mouvements

Comme c’est le cas pour le Héron cendré, les mouettes hivernant dans notre région ne sont que très partiellement celles qui s’y reproduisent. Elles proviennent principalement du Nord de l’Europe, d’une vaste zone délimitée au Sud par la Suisse, au Nord par la Finlande, à l’Ouest par le Benelux et le Danemark, et à l’Est par la Pologne et les pays baltes. L’effectif en hivernage est méconnu. Un dortoir, régulier et spectaculaire, sur la réserve ornithologique de Villars les Dombes, pourrait accueillir 15 000 à plus de 18000 oiseaux. La plupart s’alimentaient sur un vaste dépotoir voisin récemment fermé. Leur recours reste le dépotoir péri-urbain de Bourg-en-Bresse à une trentaine de kilomètres du centre Dombes.

Les ornithologues[3] ont relié le départ d’un fort contingent dès la mi-juin avec une diminution d’une source alimentaire primordiale : le Lombric. A cette époque, cet invertébré est moins actif sous la surface des sols, et les terres cultivées sont devenues le « béton » que l’on connaît. Si la régression de la population locale reproductrice de mouettes se confirmait, il faudrait donc en conclure, moins à une évolution des orientations piscicoles qu’à celle concernant l’assolement en périphérie d’étang.

Chaque année, vers la mi-mars, la colonie se reconstitue.

Un couple de paysans avait vécu toute sa vie adossé à une des plus grandes colonies de la région. A leurs dires, elle compta sans doute autrefois plus de 2000 couples. On s’y octroyait même le droit, sous la responsabilité du propriétaire, de procéder à la récolte des œufs : en moyenne 3 par nid, que l’on multiplie sans peine par deux, trois cents ! Les mouettes ne semblaient pas en avoir pâti outre-mesure. Il s’agissait là d’une pratique, exceptionnelle, mais compensable grâce aux fortes potentialités de l’espèce et du milieu. On adoptait localement, une tradition ancrée dans les régions du nord de l’Europe : le ramassage des premières pontes, lesquelles étaient aussitôt remplacées.

Et puis, au cours des années 1990, un matin, le calme s’impose, seulement relatif, mais aux oreilles des « anciens », il prenait une dimension proche de l’absolu : les mouettes ne sont pas revenues, pour la première fois en près d’un demi-siècle. Même lors des assecs, rares sur cet étang, on faisait la différence.

...Soudain le silence

On avait acquis, au fil du temps, cette capacité à assimiler la présence simultanée des mouettes et de l’eau et, à l’inverse, l’absence d’eau égalait l’absence, alors explicable, logique, des mouettes. L’absence des mouettes, avec un étang que les paysans « sentaient » en eau, avait pris une dimension pesante pour ce couple, en fin de parcours professionnel. D’un coup d’un seul, il comprenait, à l’écart du monde, qu’une page était définitivement tournée.

Population actuelle :

Reproduction : 3400 individus répartis en 7 colonies (2008).

Hivernage : plus 15000 individus sur un seul dortoir.


  1. Vers de terre []
  2. canards plongeurs comme le milouin, le morillon). Il n’est pas rare que, même le Vanneau huppé Vanellus vanellus et l’Echasse blanche Himantopus himantopus, puissent se joindre au vacarme de leurs hôtes lorsque l’étang répond simultanément à toutes leurs exigences.

    Mais les colonies de mouettes sont de moins en moins nombreuses : 2000 à 2200 couples en 8 colonies en 2009, contre environ 5000 couples pour 26 colonies en 1999. Entre ces deux dates une tendance régulière, lourde à la diminution. A titre de comparaison, le Forez, avec trois fois moins d’étangs, en compterait environ sept mille ((Guide du naturaliste en Dombes, éd. Delachaux et Niestlé []

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